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échec de l’art comme interrogation subversive de notre société était flagrant : la cote des artistes hier renégats montait à toute allure et les échanges allaient grand train.
La société marchande était capable d’acheter jusqu’aux plus fulgurantes trouées faites à son décor et d’en faire des trous positifs : un bon placement.
Nous découvrions avec stupeur que le Vrai est un moment du Faux et que tout était négociable.
L’insatiable instinct de bête de mort du pouvoir marchand s’appropriait jusqu’au désir de sa propre destruction et en faisait commerce en le sacralisant.
Le NON de l’artiste devenait la caution de ce qu’il niait, à plus ou moins long terme; question de digestion...
L’art n’était plus ce poison efficace dont nous avions rêvé, mais une liberté provisoire exemplaire.

La chaise artistique devenue objet d’art nous n’avions plus rien où poser notre cul.

Dans un monde où un jeu de miroirs très subtil nous renvoyait toujours à des images sans corps, il nous fallait tenter de vivre.
Ce fut d’abord refuser de survivre comme on nous l’ordonnait.
Cet ordre là, merci. Un bonheur illusoire, véritable trompe-l’oeil où nos forces vitales seraient vouées à l’épuisement du désir par la consommation.
Cynisme ultime du pouvoir des marchands de vouloir faire de nous des cadavres heureux monnayables à merci.

Il nous restait nos corps. Nos corps sans nom, sans signature. L’histoire de la révolte devenait anonyme.

Il nous restait nos corps et cette seule évidence : la vie de tous les jours serait l’art clandestin de la révolte et le désir sa poésie...

emmanuelle k.
La mariée mise à nu (inédit)